Témoignage n°11 Pratique innovante: Cathy
Ma pratique de classe
Mon histoire
Tout d’abord, je veux un peu expliquer comment j’en suis venue à enseigner comme je le fais dans ma classe aujourd’hui.
Je suis une ancienne institutrice, issue de l’école normale, sans formation à la maternelle.
Par contre quand je suis sortie de l’école normale, j’ai eu la chance de rencontrer une inspectrice maternelle (à l’époque la maternelle et l’élémentaire étaient séparées) qui souhaitait qu’on fonctionne dans la classe par atelier, sans groupe de couleurs, d’animaux… et j’en passe.
Les premières fois où j’ai été inspectée, elle me disait que je devais plus intervenir, être plus présente dans les coins jeux. Bien sûr, je ne savais pas du tout ce que cela voulait dire, ni même comment y arriver, d’autant plus que je n’avais pas de budget pour agrémenter mes coins jeux.
Pour gérer mes ateliers, j’avais un tableau à double entrée où je cochais ce que les enfants avaient fait (j’ai eu jusqu’à 38 TPS-PS dans ma classe). Bien sûr, les exigences de l’école maternelle et la recherche n’étaient pas ce qu’elles sont aujourd’hui.
Parallèlement, j’ai visité des écoles parallèles, privées et lu beaucoup de témoignages sur ces essais pédagogiques. Je rêvais d’une école différente avec une équipe, des moyens…. L’école Montessori de Lille (à l’époque j’habitais dans le Nord) m’a profondément déçue : triste, grise, aucune réalisation plastique d’enfants sauf quelques pauvres coloriages au crayons à papier d’images pieuses (c’était une école catholique).
Nous avons essayé avec mon mari de faire une classe ouverte complètement décloisonnée dans une école où nous avions réussi à être nommés tous les 2. Aucune aide des collègues, au contraire.
On a passé 15 jours avant les vacances à repeindre des espaces à mettre des cadres au mur, à agrémenter le lieu et la rentrée….
70 TPS – PS à 2 avec une ATSEM qui n’était pas toujours présente dans la classe (il n’y en avait que 2 pour 5 classes) avec la moitié des enfants qui ne parlaient pas le français. Ce fut très compliqué, comme je l’ai déjà dit, aucune aide de la part des collègues qui estimaient que de toute façon, il y avait des absents chez les petits et en plus, certains dormaient l’après midi.
Nous avons fini l’année en réussissant à rester ensemble….dans la vie, mais plus dans une école, nous sommes partis tous les 2 et nous sommes arrivés en Charente avec une inspectrice qui a failli ou me faire démissionner, ou me faire repartir dans le Nord. J’ai connu à ce moment là les groupes de couleurs ou autres que je n’avais jamais expérimentés. J’ai essayé plusieurs années. J’avoue que j’ai trouvé cela confortable : 4 ou 5 groupes de couleurs qui tournent sur 4 ou 5 jours. Royal !!!!
Sauf que parallèlement je découvrais Rogers, Lobrot et la non directivité intervenante. J’assistais l’été à des congrès non directifs et j’élevais avec mon mari notre fils dans la non directivité (qui n’est pas le contraire de laxisme mais de directivité), j’essayais aussi de vivre dans notre couple cette grande indépendance et cette grande liberté, je ne pouvais plus travailler comme je le faisais.
Voilà pour résumer mon parcours.
J’ai beaucoup tâtonné. J’ai eu aussi la chance de pouvoir travailler avec des conseillères pédagogiques qui avaient aussi envie de chercher. Mais pour défendre mes idées, j’ai cherché et beaucoup travaillé devant les instances officielles.
Mon fonctionnement
Voilà pourquoi depuis de nombreuses années, j’organise maintenant ma classe en espace classe, que j’apprends aux enfants à respecter et aux parents qui entrent dans ma classe tous les jours pour lire, faire un jeu, construire, jouer à la pâte à modeler…
Je n’ai pas de groupe car ce qui me chagrinait aussi dans l’histoire des groupes, c’était que les enfants travaillaient toujours avec les mêmes enfants, quand ils étaient absents, ils devaient « rattraper ».
En début de semaine, après l’accueil qui est forcément un peu long puisque les parents restent un moment dans la classe, je présente les ateliers que je mène et que mon ATSEM supervise. Bien sûr, je rappelle brièvement les autres jours le but de ces ateliers.
Les enfants choisissent avec mon aide, au regroupement ce qu’ils veulent faire. Je coche ceux qui viennent avec moi pour essayer de proposer ces ateliers pendant la semaine à ceux qui sont peu motivés.
Les enfants savent qu’ils ont le choix, certains me disent : non, j’ai pas envie, moi je veux construire (par ex)
Bien sûr, on peut dire que parfois, c’est un peu la pagaille avant que tout le monde soit installé.
J’ai encore des difficultés avec mon ATSEM que je trouve adorable par ailleurs : elle a encore tendance à dire aux enfants, tu peux aller jouer si tu as fini ton travail alors que pour ma part, je pense qu’ils travaillent partout mais différemment.
Parfois aussi, quand je veux différencier (notamment en langage, pour éviter d’avoir de gros parleurs avec des petits parleurs), je dis aux enfants : aujourd’hui, je veux que X Y Z W viennent avec moi à la table de pâte à modeler (par exemple) pour dessiner au tableau. Je sais que ma pratique n’est pas parfaite, mais elle me convient et je sais que les enfants dans ma classe sont très autonomes.
Je n’ai pas « d’ateliers autonomes » de type Montessori, mais des espaces de classe autonomes (voir mes programmations d’espace classe par période). Les enfants peuvent y aller quand ils veulent, il n’y a pas des moments autonomes et des moments pas autonomes.
Quand j’ai besoin, moi ou mon ATSEM d’un espace, je dis aux autres enfants : aujourd’hui, vous n’allez pas à la cuisine, j’ai besoin d’y aller avec les enfants de mon groupe.
Dans ces espaces de la classe, il y a des ateliers de manipulation comme Montessori, mais je ne fais pas de tiroirs individuels. Cela ne me plait pas, je choisis dans la mesure du possible que les enfants soient plusieurs car je pense que mon rôle est aussi d’en faire des êtres sociaux.
Mes interrogations – mes difficultés
Je ne dis pas que tout est rose tous les jours, ni avec tous les enfants, mais je me retrouve bien dans ma façon de fonctionner. Quand je m’énerve, j’essaie de prendre de la distance : qu’est ce qui fait que je m’énerve sur tel enfant, tel fonctionnement. C’est presque toujours ma peur, peur de perdre le contrôle, le contrôle de la classe. J’apprends encore, après des années d’enseignement, à lâcher. Pour moi, c’est sûrement un challenge depuis toujours dans mon métier et dans ma vie.
Je continue aussi à intégrer de nouvelles connaissances (les intelligences multiples par exemple, nouvelles pour moi, même si elles ne le sont pas). Je sais aussi que j’ai besoin de lenteur pour changer ma classe et mon fonctionnement, je ne peux pas (comme certaines collègues que j’admire pour cette faculté) modifier du jour au lendemain.
C’est aussi ce que j’ai appris : me respecter pour respecter les enfants.
Je n’ai pas de cahier de réussites pour l’instant (du moins lisible par les enfants, car j’ai toujours avec moi mes grilles tableau à double entrée où je note les réussites des enfants que je souhaite évaluer), je n’y arrive pas, surtout avec les cahiers de langage de type Boisseau qui demandent déjà beaucoup de temps. J’y réfléchis encore, c’est mon prochain challenge et je sais que cela me demandera de changer encore le fonctionnement.
Je ne note pas le passage à tous les ateliers – coins jeux, les enfants y vont comme ils veulent et aussi longtemps qu’ils veulent.
C’est d’ailleurs une de mes difficultés, car quelques enfants (peu heureusement) ne veulent pas spontanément participer : je veux jouer aux voitures, faire du vélo. Bien sûr ils ont certainement besoin de bouger, mais moi je m’inquiète : quel est mon rôle là, face à ces enfants qui n’ont que peu d’appétence à apprendre, même différemment. Bien sûr, je les incite à participer avec moi aux « ateliers dirigés », mais cela ne me plait pas, car je pense que je dois arriver à leur donner envie d’apprendre.
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La classe période 5 chez Cathy - école petite section
Je t'envoie ma classe en période 5 pour finir l'année. J'y ai intégré comme pour les périodes précédentes une référence aux intelligences multiples et aux besoins des enfants d'après Masl...
http://www.ecolepetitesection.com/2016/04/la-classe-periode-5-chez-cathy.html
Michel Lobrot, né le , est un psychopédagogue français. Il est professeur émérite à l'université de Paris 8. Il a été l'un des membres du centre universitaire expérimental de Vincennes et...