La question du regard sur les productions artistiques des élèves
La question du regard sur les réalisations plastiques entre dans deux champs. L’un concerne le raisonnement, l’autre l’émotionnel.
En tant qu’enseignant, la nécessité de créer des situations didactiques pour développer des apprentissages concerne tout autant le langage que les arts, la transversalité de ces disciplines est d’ailleurs toujours recherchée. L’aboutissement d’un travail est soumis au respect de la consigne, si l’objectif est technique, qu’il a fallu reproduire un geste, imaginons le geste concentrique observé chez Zitko

l’observation de la production finale va permettre de dire si l’objectif est atteint et le regard se situe alors du côté du raisonnement. Plusieurs manières de faire sont pratiquées :
- l’enseignant fait ses observations et juge (oui-non),
- l’enseignant demande à l’élève s’il pense avoir fait ce qui était demandé,
- l’enseignant s’en remet au groupe et crée une situation interactive où les réalisations sont confrontées à la représentation de la consigne des uns et des autres. L’émotionnel ne peut interférer dans la mesure où l’apprentissage porte sur un geste technique et qu’il n’est pas question de valoriser une réalisation plutôt qu’une autre en dehors de la stricte capacité à reproduire un mouvement. Il semble important que dans ces situations d’interactivité, riches en débat, la clarification de l’objectif soit parfaite : « Qu’est-ce que l’élève doit être capable de faire ? Qu’est-ce qui prouve qu’il y est réellement parvenu ? ». L’intérêt de ce regard en groupe permet une évaluation créatrice de sens et une décentration utile à tous. Faute de temps, il est vain d’imaginer pouvoir le faire de manière systématique.
Et l’émotionnel ? A-t-il sa place dans la classe ? N’y-a-t-il pas dans les référents des programmes, l’item « Eprouver des émotions » ? Comment y accompagner les élèves ?
Bien-sûr, les œuvres artistiques sont les premiers supports aux ressentis, les élèves les livrent dans toute leur spontanéité mais il me semble que le propre regard d’un enfant face à sa production peut être développé en ce sens. L’expression de son impression peut être attendue, du moins questionnée : « Est-ce que tu as aimé faire cette peinture ? Est-ce que ça te donne envie de recommencer ? Qu’est-ce qui te plait ? » Et le non verbal peut également trouver sa place. J’avais une pratique en fin de séance d’arts plastiques qui voulait que les élèves se reculent et prennent le temps de regarder leur réalisation de loin, c’était un moment sans commentaire, sans parole, un peu suspendu où les sourires intérieurs pointaient dans les yeux, sur les lèvres quand les enfants avaient compris combien ce regard finalisait leur travail… ou pas. Effectivement au fil du temps, ce regard en recul venait naturellement accompagner la mise en pensée de l’action à venir, mélange alors de raisonnement et d’émotion.
Reste à savoir ce que l’enseignant fait des réalisations achevées. Plusieurs options sont possibles :
- Rien et celles-ci sont classées ce qui permet à l’élève et à sa famille de les récupérer plus tard, à moins qu’elles ne soient distribuées au fur et à mesure.
- Réutilisées dans d’autres productions soit en fond, soit en découpage-collage , soit en « restauration » ( reprendre une production et l’enrichir à nouveau en autonomie, ou dans une nouvelle situation d’apprentissage)
- Affichées dans la classe, dans le couloir, dans d’autres salles
Concernant l’affichage, il est peut être vain de l’écrire mais je souhaite insister sur cette précaution, il est préférable de veiller à n’oublier personne dans les choix d’affichage. Un élève qui ne voit jamais son travail exposé en subit une atteinte à son estime soit par le constat qu’il a fait, soit par le ressenti familial. J’avais pour habitude que la première réalisation plastique de l’année scolaire soit affichée pour tous, de façon à ne pas créer de déception dans une période difficile qu’est la première rentrée scolaire.
L’affichage demande du soin et un certain esthétisme. Une multitude de possibilités sont envisageables, et seuls l’imagination ou le manque de temps (oui, cela a un coût) peuvent freiner la diversité de cette valorisation.
Il me semble important que les prénoms soient lisibles car en dehors des œuvres collectives, chaque production appartient à son créateur et il est juste de lui rendre son bien.
Lorsque le travail est inspiré d’un artiste, il est souhaitable d’y faire référence par respect pour celui-ci et pour que les élèves poursuivent leur mémorisation culturelle.
Enfin, il peut être indiqué le type de situation : en activité dirigée ou en autonomie afin de mettre en avant les réinvestissements qui peuvent être faits lors de l’activité libre.