Les états d'âme de la rentrée
Cette semaine, je vais republier des articles qui se sont perdus dans les tiroirs profonds du blog et qui peuvent encore servir....
Celui-ci devrait vous encourager à accepter qu'une rentrée (et surtout si c'est la première) est normalement stressante. Inutile de lutter, c'est un fait. En acceptant cet état, vous vous laissez emporter par le courant de vos émotions négatives et vous ne perdez plus votre énergie à lutter contre celui-ci. Alors, il y a de fortes chances pour que ces émotions perdent de la puissance et vous laissent un peu plus tranquille. N'attendez pas la plénitude, c'est impossible (sauf à de rares exceptions qui, parfois, m'interrogent également).
Longtemps avant d’atteindre la "maturité mentale" ( disons la poursuivre) , j’ai subi des fins de mois d’Août anxieux.
Cela commençait après le 15 Août, une sorte d’attente d’un monde inconnu aussi inquiétant que stimulant. Cette ambiguïté n’était pas sans conséquence sur mes fins de vacances. La préparation occupait mon esprit et mon temps ; je déconnectais de l’espace réel pour investir l’espace mental. Mes dispositions à l’égard de mes proches s’amenuisaient, tout convergeait vers un seul et même but : préparer le mieux possible la rentrée.
Mon inconscient était aussi envahi et chaque année, il me livrait durant plusieurs nuits des scénarios cauchemardesques qui m’indiquaient par leur survenue que j’étais entrée dans cette période détestable qui ne connaîtrait sa fin que le lendemain de la rentrée.
Ces épisodes nocturnes montraient l’étendue de mon imaginaire en matière de rentrée ratée. J’y retrouvais des problèmes d’accès : pour arriver dans la classe, les enfants et leur famille devaient monter à l’échelle !!! ou bien des problèmes d’organisation : je n’avais aucune liste, aucun nom d’élève alors que les familles cherchaient !!!! ou encore des problèmes de présence :aucun élève ne se présentait dans ma classe qui pour l’occasion s’avérait être totalement vide de meubles, de matériel. Ce summum d’invention catastrophique avait pour effet de me stimuler dans mes recherches et la rigueur de ma préparation.
Le second moment où l’inquiétude montait encore d’un cran était la veille de cette fameuse rentrée, le jour de la pré-rentrée. L’allégresse de retrouver mes collègues, le personnel de l’école était contrebalancée par un sentiment d’interrogation autour du jour suivant sans aucune rationalité. C’était de l’ordre de l’émotion, je dirais presque de l’habitude. Mon cerveau répondait à l’équation : rentrée = peur.Il fallait transformer ce jour en moment de vive tension.
Mon expérience d’abord et ma volonté de comprendre ensuite ont fini par avoir raison de cette épreuve temporelle.
L’expérience à travers l’observation me permit de constater que la vive tension ressentie n’était pas sans conséquence sur les pleurs de mes petits élèves. Leur mode de communication étant réduit, ils s’attachaient beaucoup au non verbal y compris chez leur interlocuteur : les gestes, les regards, les mimiques et les comportements en disent long sur nos tensions intérieures. Ainsi une maîtresse envahie par sa propre peur n’offre pas une base sécurisante pour un être lui-même affaibli psychologiquement. Et en conséquence, les pleurs trouvent leur raison d’être lorsque l’enfant n’est entouré que d’adultes en proie à leur émoi.
Il me fallait donc comprendre pour mettre en place des réponses adaptées à mon angoisse latente.
En premier , ce cheminement fut une exploration normale de mes propres rentrées en tant qu’élève, d’un rappel des émotions antérieures que j’avais mises de côté, celles-ci étaient les prémices d’un caractère perfectionniste élaboré par une histoire personnelle où la recherche du « plaire » dépassait les autres sentiments.
Dans une seconde phase, j’étudiais plus précisément ce sentiment de perte de soi sous le regard de l’autre et cette entière dépendance à la reconnaissance de soi-même. Ce fut ce terme « dépendance » qui m’indiqua l’orientation de mes réponses.
D’un tempérament volontaire et démarqué, il y avait pour moi une contradiction manifeste dans mon comportement. Comment pouvais-je être aussi dépendante du regard des autres, alors que dans le même temps je cherchais l’originalité et l’innovation ?
Attirer le regard tout en le craignant !
Il me fallait donc l’accepter et l’accueillir.
Cependant le penser n’était pas suffisant. Je devais me construire un raisonnement objectif sur lequel m’appuyer en cas de retour en arrière.
A la recherche de ces raisons, une évidence vint me frapper, sur laquelle je ne m’étais jamais vraiment penchée, c’était pour moi de l’ordre de l’induit, il n’y avait pas nécessité à y réfléchir, à l’envisager concrètement , une sorte d’accord tacite et pourtant …….
Cette évidence, cette affirmation simple était : « Mes élèves et leur famille ont besoin de moi. »
En prononçant cette phrase , je passais d’une dépendance ( la mienne ) à une autre dont j’étais l’enjeu ; mes compétences, mon professionnalisme n’étaient pas jugés mais désirés, attendus, voulus. Ce changement d’angle de vue bousculait mes vieux réflexes.
L’effet produit fut une transformation de mon état intérieur. J’étais apaisée. Cela n’allait pas avoir de conséquence sur ma pratique qui avait toujours été consciencieuse et convaincue. Mais j’abordais les rentrées avec une grande sérénité, peut être un léger pincement du temps où mes sœurs se mettaient à deux pour me pousser dans la cour de l’école !!!!!!
J’ai choisi de vous parler des états d’âmes car je pense que certains d’entre vous se retrouveront dans ma propre expérience, j’amène une réflexion qui est toute personnelle mais qui peut provoquer la vôtre dans une recherche du mieux être et je vous témoigne ma solidarité en des moments quelquefois sinueux.