Le carnet de suivi et l’observation : plus ou moins d’observables ?
Après avoir relu les commentaires du dernier article « Le carnet de suivi et l’observation : quelles pratiques ? », j’ai choisi de revenir sur l’aspect « inventaire » qui fait jour dans l’élaboration de certains carnets de suivi.
J’entends par inventaire l’empilement des progrès à observer.
Attachés à la volonté de balayer l’ensemble des domaines d’apprentissage de manière égale, les enseignants souhaitent pouvoir éclairer toutes les facettes de chaque enfant. Partant d’une envie de bien faire, ils s’imposent une capacité de regard qu’ils ne pourront jamais atteindre. Non seulement, ils ne pourront pas le faire mais de surcroît, ils vont en tirer un sentiment d’impuissance, et pour certains d’échec qu’ils tenteront de masquer en remplissant coûte que coûte un carnet de suivi au détriment de l’observation réelle et analysée.
A quoi bon vouloir tant de cases à remplir ? Est-ce au nombre d’items cochés qu’on mesure la qualité d’un enseignement ? Que signifie ce désir d’abondance ? Faut-il s’infliger un but inatteignable afin de mieux renoncer à toute observation ? Ne faut-il pas être moins ambitieux et plus réaliste ? Encore que moins ambitieux n’est pas vraiment approprié, car l’ambition est justement de trouver la voie la meilleure pour aider chacun des élèves à atteindre son épanouissement scolaire. Or , en se donnant une multitude de points d’observation, on prend le risque de ne pas y parvenir préoccupé par l’étendue du travail et confronté au nombre d’élèves concernés.
Les parents n’attendent pas cette quantité de mesures, ils souhaitent observer des progrès et sentir que l’enseignant connaît bien leur enfant et s’en occupe.
J’ai pensé en lisant les documents d’accompagnement pour l’élaboration du carnet de suivi que nous allions vers une simplification par rapport aux livrets scolaires et j’observe (exemples de carnet de suivi trouvés sur le net émanant parfois de sites académiques) une complexification qui m’alarme. Il y a une surenchère d’observables. Qui peut m’expliquer concrètement comment faire dans une classe de 30 élèves pour observer 60 items en langage, 24 en EPS, 36 en activités artistiques, 53 en maths, 46 en exploration du monde et 51 en vivre ensemble comme j’ai pu trouver sur un site Pôle maternelle ? Et quand bien même ceux-ci représentent un cycle c’est à dire 3 ans, j’ai fait le calcul : 60+24+36+53+46+51= 270 * 30 (élèves)=8100 observations / 3 (an)=2700 observations/36 (semaines d’école) =75 observations/ 5(jours d’école) = 15 observations à faire par jour et à renseigner d'un écrit dans le carnet de suivi (cf document d'accompagnement :"Mais, un cahier de réussite ou de progrès (ainsi considéré du point de vue de l’enfant) ne peut constituer un carnet de suivi des apprentissages que s’il est complété par un écrit synthétique régulier de l’enseignant rendant compte et validant des progrès de l’enfant dans les divers domaines en prenant appui sur les observables proposés". )et tous les jours pendant 3 ans !!!!! Mon calcul est sûrement caricatural mais c’est évidemment trop. A quoi ça sert ? Puisque c’est matériellement impossible, pourquoi ne pas alléger et cibler ce qui semble essentiel ?
J’aimerais votre point de vue sur la question. Etes-vous dans cette élaboration d’abondance ? Vous êtes-vous opposés à des propositions de ce type ? Quels sont les arguments des partisans d’un carnet de suivi fourni ? Avez-vous fait des choix et lesquels ?